SENTIMENT DE HONTE ET HS

Verneuil qu'on tait par pudeur, honte ou culpabilité

La maladie de Verneuil est souvent associée à un sentiment de honte, un tabou. Et cet embarras affecte notre santé.

Pudeur, honte, culpabilité et peur poussent les malades à se taire en consultation chez un généraliste.

Une maladie honteuse. On lit cette expression partout et surtout, à propos de dizaines d’affections différentes. Le cancer anal, les troubles obsessionnels compulsifs, le psoriasis, mais aussi la gale, la dépression, l'épilepsie, la maladie de Verneuil, la polyarthrite rhumatoïde, le Sida, l'alcoolisme… La liste est infinie...

Ne pas perdre le contrôle

C’est que ce n’est pas tant le type de pathologie qui crée la gêne mais le simple fait d’en être atteint. En étant parfois forcé de se déshabiller –donc de dévoiler son corps–, la ou le patient expose l’intérieur de lui, où quelque chose de mauvais et d’involontaire se développe. Toute notre éducation va dans le sens du contrôle de soi, du maintien, d’une certaine tenue. La maladie contrecarre ce système et fait émerger le sentiment de honte. Réflexe de protection, nous adoptons la technique de l’autruche. Et dissimulons, mentons, arrangeons la réalité face au médecin. Au mieux, on tente un coup d'esbroufe: «Docteur, j’ai un ami qui...», qui en général ne trompe personne. Parmis les motifs qui poussent les malades à se taire: pudeur, honte, culpabilité et peur sont citées. Dans sa thèse «Le non-dit du patient en consultation de médecine générale», le Dr Elodie Vignon conclu que les pathologies concernant les sphères génitale et anale, les addictions et les troubles psychiques sont celles qui occasionnent le plus de tabous.

De nombreux tabous

Les exemples ne manquent pas. D’après l’Association française d’urologie , une sportive de haut niveau sur deux (51,9%) est sujette à des fuites urinaires. Seulement 5% de ces athlètes en ont informé leur médecin. En 2014, un sondage de TNS Sofres montrait que neuf personnes sur dix voyaient au moins une bonne raison de cacher une pathologie neurodégénérative, comme la maladie de Parkinson. On estime que la moitié des Français et Françaises atteintes de la maladie d’Alzheimer ne sont toujours pas diagnostiquées

Étude Zava réalisée par l’institut BVA par Internet du 20 au 24 avril 2017 auprès d’un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans ou plus.

Aggravation des symptômes, isolement, perte d’emploi... les conséquences du retard ou de l’absence de diagnostic sont multiples. Ne pas traiter un problème d’incontinence peut causer des infections urinaires à répétition. 90% des hommes concernés par la maladie de Verneuil ressentent de la frustration ce qui peut conduire à une séparation du couple. Plus dramatiquement, la dépression est la première cause de suicide: près de 70% des personnes qui décèdent par suicide souffraient d’une dépression, le plus souvent non diagnostiquée ou non traitée, selon Santé Publique France .

Moins de recherche sur les maladies honteuses

Conséquence encore plus pernicieuse que le sous-diagnostic, le tabou entourant certaines affections façonne aussi la recherche médicale. Du côté de la maladie de Verneuil, qui concernent 670.000 personnes en France, il y a eu de nombreux progrès ces 8 dernières années, mais peu de recherches portent sur les causes qui ne sont toujours pas définies. Les laboratoires se sont rendu compte que sur le plan commercial, c’est très intéressant, car il y a beaucoup de malades, que ce sont des pathologies chroniques et que le diagnostic peut se poser à l’adolescence. En tablant sur une espérance de vie moyenne, c’est il faut bien l’avouer le jackpot assuré pendant soixante dix ans. Côté mécénat, ce n’est pas formidable non plus. Les marques trouvent notre combat super mais ne souhaitent pas donner leur image à la maladie de Verneuil. C’est là tout le problème de traiter d’une maladie pas sexy.

Restent les financements publics. Mais l’accueil n’est pas plus chaleureux. Quand on va voir les politiques, qu’on leur explique que ce sont des maladies fréquentes et qu’on peut trouver la cause, ils nous disent “ok je comprends, mais moi qu’est-ce que je donne comme information à mes électeurs?”. C’est plus facile de dire “je lutte contre le cancer” que contre la maladie de Verneuil où les malades vivent à 20 ans avec des abcès suppurants et parfois une couche.»

«Laisser des temps de silence»

Pour contrer ces freins, l’information reste la pierre angulaire. Dans le cabinet médical, il faut établir une parole simple, libre et compréhensible, avec des temps de silence pour laisser la place. Le dialogue n’est plus descendant de nos jours et les patientes et patients sont de plus en plus informés. Avoir du temps, c’est le plus important. Mais comme les malades ont moins d’une minute pour s’exprimer devant leur généraliste, la communication passe mieux si les pouvoirs publics s’emparent aussi du problème.

Mesure simple, les brochures d’information placées dans les salles d’attente ont prouvé leur efficacité. L’agence de relations publiques IDS Media a mené en 2017 une opération sur les hémorroïdes. Résultat: 46% des médecins ayant placé ces dépliants dans leur salle d’attente ont assuré que de nouvelles personnes souffrant d’hémorroïdes se sont déclarées à la suite de la campagne. Dans le même temps, 84% des brochures mises à disposition ont été emportées par les patientes et patients.

Les malades atteints de pathologies chroniques, comme la maladie de Verneuil, sont des athlètes de haut niveau qui déploient des mécanismes d’adaptation chaque jour pour avoir une vie normale. C’est comme un cycliste qui gravit tous les jours le Mont Ventoux. Il faut montrer leurs atouts. Depuis le printemps 2018, les anciennes et anciens malades du cancer peuvent ajouter sur leur profil LinkedIn, une nouvelle compétence: «Fighting Cancer». Parce que «les femmes et les hommes qui font face à cette maladie ont développé des qualités exceptionnelles de courage, de force et de ténacité», défend l’association Cancer@Work

Alors à quand une comptence «Fighting Chronic Disease» ? Vivement ce jour-là qui montrera qu'on est enfin allé bien loin de la honte.

Sources: La-croix.com

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